Terminer sa douche par l’eau la plus froide possible peut-il booster le système immunitaire ? Analyse de ce coup de fouet qui rend accro.
Sommaire
Finir sa douche par une minute d’eau glacée serait la panacée pour le système immunitaire. Ce « choc » thermique se nourrit de toutes les légendes polaires avec des adeptes qui ne connaîtraient pas la maladie.
Santé Nature Innovation se fait l’écho de cette méthode naturelle et spectaculaire. « S’exposer au froid stresse le système immunitaire, ce qui provoque un effet stimulant et anti-âge » nous prévient-il.
La preuve qu’une douche froide serait un remède anti-âge ? Une étude menée sur plus de 3 000 Hollandais parue d’une un journal scientifique de qualité (Plos One).
Les participants à l’étude soumis à température glacée ont eu 29 % de congés maladie en moins que les autres.
Simple, rapide, efficace n’est-ce pas !
Moi-même qui suis une sorte d’adorateur de la douche froide, je reste sceptique quand aux vertus qu’on veut lui faire porter.
Décryptage.
La douche froide ne rajeunit pas
Autant détruire vos espoirs le plus vite possible. Non, les douches froides ne sont manifestement pas des cures de jouvence comme peuvent essayer de vous le faire croire certains sites internet.
L’étude parue dans Plos One chez plus de 3 000 personnes nous le précise.
Fallait-il encore la lire. Mais on peut difficilement reprocher à l’équipe de Santé Nature Innovation ce point… Ils se limitent à la lecture des résumés, et même dans ce cas-là, ce n’est pas joli-joli.
Bref, l’étude hollandaise ne montre en réalité aucun bénéfice de terminer sa douche par une trempette la plus froide possible. Et pourtant à l’époque de la conduite de l’étude, l’eau froide était aux alentours de 10-12°C.
Ça pique quand même.
Pour faire court, les auteurs de cette étude ont demandé aux participants de s’autoévaluer pendant 90 jours.
Le principal critère d’évaluation est vraiment problématique : c’est le nombre de congés maladie.
On peut prendre des congés maladie pour différentes raisons… et parfois pour des raisons qui n’ont aucun lien avec une maladie. Et cela ne renseigne absolument pas sur le type de maladie.
Cela pourrait très bien être une foulure, une luxation d’épaule pendant un déménagement, une intoxication alimentaire.
Ce n’est absolument pas fiable et les auteurs le reconnaissent dans la discussion de ce travail.
En revanche, les participants devaient préciser le nombre de jours où ils ont bien été malades pendant les 3 mois de surveillance. La moyenne est de deux jours dans tous les groupes !
Bref, il n’y a strictement aucune différence et aucun effet de la durée de la douche froide : 30, 60 ou 90 secondes.
En fait si. Les auteurs montrent bien un seul effet statistiquement significatif (sur 90 jours) et sérieux d’un paramètre sur la fréquence des arrêts-maladie. C’est le sport !
Bienfait sur la qualité de vie ?
Dans le détail, l’étude montre une bénéfice statistiquement significatif sur la qualité de vie en pratiquant la douche froide. Pourquoi j’ai caché ce bénéfice ? Car s’il y a bien un bénéfice “statistique”, il n’y a “cliniquement rien de pertinent.
C’est toute la différence entre le statistiquement et le cliniquement significatif. Je vous recommande de lire mon article dédié à ce sujet !
Continuer le froid malgré tout ?
Pour autant, et malgré l’absence de ce bénéfice dans une population déjà en très bonne santé, plus de 90 % des participants déclarent vouloir continuer à finir sa douche par une torture glaciale.
Mais pour quelle raison ? Et bien pour la même raison centrale qui me fait moi aussi continuer à le faire (de temps en temps) : ça fait du bien.
Oui, on se sent fichtrement bien après avoir affronté les lames givrées pendant quelques instants.
Un moment de dépassement et quelque part de fierté qui donne un véritable coup de fouet que les participants comparent sans surprise avec la caféine.
On a l’impression de recharger ses batteries et c’est une composante assez essentielle du bien-être : avoir la forme.
Des bienfaits à démontrer
Le mystère des expositions froides sur la santé est encore bien tenace. On manque de recul et d’études sérieuses qui documentent cette pratique.
Je parle aussi bien des douches froides que des bains glacés plus exceptionnels pratiqués dans certains pays.
Aujourd’hui nous n’avons que des pistes, des promesses plus ou moins fragile. L’exposition au froid d’une manière précise et forte (avec la cryothérapie) pourrait avoir un intérêt dans le traitement de l’obésité et du diabète (qu’on peut manifestement oublier pour traiter les problèmes d’odorat).
Une autre voie serait celle de l’inflammation. L’exposition au froid pourrait réduire la para-inflammation ou dite de bas grade qui peut entraîner des problèmes à long terme sur la santé.
Par quel mécanisme ? En limitant l’activité des fameuses cytokines pro-inflammatoire (mise en avant dans l’aggravation de l’état de santé du covid avec l’orage cytokinique) et en particulier des TNF et autres interleukines.
Des exposés plutôt isolés mettent en avant un changement dans le profil oxydatif de l’organisme. Mais c’est extrêmement préliminaire. Ou alors via la stimulation du nerf vague.
Pour conclure, non les douches froides ne sont pas des cures de jouvence qui vont vous redonner le système immunitaire de vos 20 ans.
Il y a toutefois des pistes thérapeutiques très intéressantes sur ce sujet, et bien souvent, l’essayer c’est l’adopter !
Je vous recommande de lire mon enquête sur la méthode Wim Hof avec l’exposition au froid, le renforcement musculaire, la méditation et l’hyperventilation. C’est instructif si ce sujet vous intéresse !