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Influenceur, coach sportif et diététique… Nassim Sahili propose des contenus vidéo de qualité sur la musculation, la nutrition et le bien-être, souvent sous couvert scientifique. Je m’intéresse d’un peu plus près à certains de ces conseils.

Capture d’écran de la vidéo “6 erreurs qui détruisent votre santé” avec Nassim Sahili à l’image.

Nassim Sahili : de qui parle-t-on ?

On parle d’un gros bonnet du monde de l’influence sur la musculation et la diététique. Nassim Sahili met à disposition depuis 2011 son expérience sur sa chaîne YouTube qui compte plus d’un million d’abonnés et 150 millions de vues.

Les vidéos sont bien léchées. Le coach en musculation parle d’un ton calme, posé, avec un brin d’humour et des références scientifiques.

Que demander de plus ?

J’ai déjà regardé plusieurs vidéos de sa chaîne sur la musculation, mais surtout sur la diététique, les protéines végétales avec une qualité de réalisation qui fait mouche.

Mais que valent les conseils de Nassim Sahili ?

Alors attention, je ne vais pas me risquer à fact-checker ses propos en musculation ou cardio. C’est un domaine bien trop éloigné de mes compétences. Il me faudrait faire un travail de fond colossal pour connaître des bases et éviter les écueils de débutant.

Sur ces points-là, je botte en touche.

Je vais donc bien sûr me concentrer sur les domaines qui m’intéressent : la santé, la nutrition et les sujets plus légers comme la fameuse histoire des 10.000 pas par jour, la respiration par le nez ou encore comment la posture va influencer notre moral.

Car j’ai déjà pu traiter certains de ces sujets. Pour les autres, ce sera l’occasion de mettre en pratique ce dont je parle sur ce blog : on va faire des revues de la littérature, et des analyses de la qualité des preuves pour confronter certaines affirmations à la réalité.

En essayant aussi de prendre du recul sur des domaines qui peuvent être délicats, comme sur la posture et l’estime de soi.

Cet article se base principalement sur la vidéo « 6 erreurs qui DÉTRUISENT votre santé » qui cumule aujourd’hui près de 500.000 vues. Mais pas uniquement. Ce sera détaillé quand nécessaire.

Nassim Sahili et la vérité

La posture

Notre posture aurait un lien déterminant et direct sur notre humeur, notre stress et notre capacité de concentration. Une aubaine pour Nassim Sahili car adopter la bonne posture permettrait de combattre le stress et les émotions négatives.

Image principale de la publication : Embodiment: I sat, I felt, I performed – Posture effects on mood and cognitive performance.

Pourquoi pas contre l’anxiété et la dépression (je précise qu’il ne mentionne pas ces deux points).

Le coach sportif précise que tout ceci est soutenu scientifiquement, montrant à l’image deux études, une « habitude » de sa part.

Les deux papiers sont des expériences directes sur des participants assis en position droite ou un peu avachi sur une table. On demande ensuite à ces participants de faire des tests cognitifs, des interviews stressantes et d’évaluer leur humeur.

Nassim Sahili décrit la méthode dans sa vidéo.

Cette idée reprend en fait les fameuses techniques de développement personnel, où des postures droites, de dominateurs avec les bras tendus doivent générer de la force, de l’assurance et améliorer l’estime de soi.

On entend beaucoup parler de ces choses pour les entretiens d’embauche notamment.

Le sujet est tellement séduisant qu’il y a eu des Ted talk.

Mais revenons à nos moutons. Est-ce qu’une position droite permet d’améliorer l’humeur et réduire le stress ? Et l’inverse est-il vrai pour les positions avachies ?

Quand on regarde en détail les résultats de la seconde étude citée par Nassim Sahili, on remarque plusieurs choses :

  • Oui, les positions semblent avoir des effets directs sur l’humeur et le stress
  • La position droite n’apporte en soi aucune modification positive ou négative des paramètres
  • La position avachie dégrade légèrement l’estime de soi et l’humeur

Donc dans les faits, cette étude ne montre pas qu’adopter une position droite permet d’améliorer l’humeur, mais pourrait mieux aider à résister à des évènements stressants.

Maigres différences

Dans notre étude clinique, on retrouve par exemple une différence d’un seul point (passant de 4 à 5 sur un total de 15) sur l’évaluation de l’humeur négative des participants en position avachie. Est-ce que cette différence statistique a la moindre portée clinique ? Impossible à dire tellement les études manquent dans ce domaine.

On remarque un peu la même chose pour l’humeur positive, avec une différence de seulement 1,4 point à la fin de l’épreuve de stress entre les deux positions (à la faveur du groupe en position droite).

Concernant l’estime de soi, il y a une différence de 9 points sur une échelle standard allant jusqu’à 100. Là aussi ces différences ne donnent aucune véritable idée de l’importance clinique réelle pour les participants.

Par exemple, cette étude montre qu’un questionnaire sur l’estime de soi (mais différent du précédent) doit montrer au moins une différence de 10 points pour avoir une importance clinique réelle pour les patients.

La première étude citée propose la même méthode, avec surtout un résultat positif sur l’humeur. Cette dernière est moins bonne chez les participants avachis sur la table.

Mais ces différences, certes statistiquement significatives, interrogent. On parle d’une différence de 0,34 point sur une échelle allant à 5. Les participants assis en position droite ont noté une humeur de 3,77 contre 3,43 pour les autres.

Autant vous dire que je doute de l’intérêt clinique réelle dans la vie des participants. Surtout que les auteurs admettent que cette différence pourrait être le résultat… de l’inconfort de la position avachie maintenu pendant longtemps.

Mais ces études n’évaluent pas l’effet de ces postures sur l’anxiété ou la dépression. Nous n’avons aucun moyen de savoir si c’est une méthode à moyen ou long terme avec un intérêt thérapeutique intéressant.

On ne sait pas. Et les auteurs néo-zélandais le précisent dans leur expérience.

La méthode

Mais ces études sociales ont de gros problèmes de méthodes.

  • Il n’y a (pratiquement) jamais de groupe témoin. Ce serait des personnes avec une position intermédiaire neutre, sans manipulation extérieure.
  • Les participants ne sont pas mis en aveugle (on peut facilement comprendre que ce point est difficile à résoudre), mais on peut masquer le véritable objet de la recherche
  • Si les groupes sont randomisés (répartition aléatoire par tirage au sort), on retrouve très peu de caractéristiques objectives sur les participants (l’âge, l’ethnie, l’IMC, le statut socio-économique, le statut marital, etc) qui pourraient pourtant avoir des répercussions importantes sur les variables mesurées
  • L’absence de protocole croisé (crossover). C’est un point important des études cliniques en nutrition où les mêmes participants suivront la méthode A dans un premier temps (par exemple la position droite) puis la méthode B (position avachie) avec une période de repos (wash-out)
  • On ne retrouve pas pour ces types d’expériences et de mesures des évaluations scientifiques rigoureuses sur les différences minimales avec des conséquences cliniques claires.

Toutefois, à la décharge de Nassim Sahili, plusieurs synthèses et méta-analyses sur ce sujet montrent bien que la position avachie « dégrade » certains paramètres émotionnels. Mais toutes ces méta-analyses se fondent sur des essais cliniques très moyens dont l’interprétation clinique est délicate, presque impossible.

Je parle dans cet article des différents niveaux de preuve en science, avec le rôle prépondérant des méta-analyses. Mais aussi et surtout que ces dernières sont des armes à doubles tranchants qu’il faut manier avec droiture.

Surtout que nos participants dans ces études sont dans la quasi-totalité des cas en bonne santé. Ce n’est pas donc pas très intéressant pour toutes les personnes concernées par des états anxieux ou dépressifs qui penseraient avoir une méthode simple pour aller mieux.

Chez les dépressifs

J’ai trouvé un seul essai clinique néo-zélandais récent qui s’est intéressé à cette population d’intérêt pour évaluer l’effet d’une bonne posture sur l’humeur et la fatigue.

Les chercheurs ont recruté 66 participants atteints d’une dépression légère à modéré en les répartissant aléatoirement selon des critères objectifs sérieux cités plus haut. C’est un très bon point.

Comme d’habitude, les participants réalisent une épreuve de stress standardisé (c’est le TSST pour Trier Social Stress Test dans ce cas-là), où le véritable objet de l’étude est masqué.

Les auteurs concluent cette belle petite étude que « l’amélioration de la posture affaissée peut améliorer l’humeur des personnes présentant des symptômes dépressifs ».

Ils décrivent cette intervention comme « simple, très acceptable et peu risquée » pour traiter la dépression.

Sauf que l’étude ne montre pourtant pratiquement aucun résultat positif en faveur de la position droite. Oui, vous m’avez bien lu. Les différences entre le début de l’expérience et la fin avec le test de stress ne montrent aucune amélioration de l’humeur entre nos deux positions.

Les auteurs torturent un peu les données dans tous les sens pour trouver certaines associations positives, mais uniquement avant l’épreuve de stress et dans un seul domaine (l’excitation et l’enthousiasme), ainsi que pour des angles précis du dos, du cou et du rachis thoracique.

Mais l’immense majorité des analyses sont négatives (notamment sur l’humeur positive ou négative). Je trouve que l’emballement de la conclusion et le titre de l’article (« la posture verticale améliore l’affect et la fatigue chez les personnes présentant des symptômes dépressifs ») sont vraiment exagérés.

Résumé : posture et humeur

Les études cliniques sont nombreuses pour montrer le lien entre la posture avachie et la mésestime de soi.

Mais ces études sont d’une manière générale de qualité moyenne, avec des facteurs confondants importants

La portée clinique de ces résultats est inconnue avec des différences faibles et mesurées principalement chez des personnes en bonne santé

Le seul essai clinique (relativement rigoureux) sur des personnes dépressives ne montre pas d’effet significatif probant à court terme

Concernant Nassim Sahili, je trouve qu’il ne fait pas de promesses alléchantes irréalistes. Il ne mentionne pas le rôle possible de la posture contre l’anxiété ou la dépression. Et les deux études sont mentionnées correctement.

Le format de la vidéo ne lui permet peut-être pas de traiter ce sujet plus en détail et garnir ses propos de prudence dans l’interprétation.

Car dans les faits, il n’est pas possible d’extrapoler ces résultats en laboratoire dans la vie réelle (à table ou au travail) ni chez les personnes dépressives qui en auraient le plus besoin.

Les auteurs de ces études n’arrivent pas vraiment à produire d’explication à ces observations. Est-ce une erreur de méthode ? Un reliquat statistique ? Nous ne savons pas. Certains avancent que la position en elle-même pourrait être désagréable et donc dégrader l’humeur des participants.

Une sorte de prophétie auto-réalisatrice.

En bref, c’est beaucoup plus complexe et ambigu qu’il n’y paraît. La position droite est loin d’être une méthode miracle, mais Nassim Sahili ne le prétend pas. Si je peux saluer la prudence dans l’extrapolation des données (nous n’avons clairement pas à faire à un Dr Saldmann ou au Dr Lallement), l’analyse manque de hauteur et de réflexion de la pertinence clinique des résultats observés.

Vous tenir un peu avachies ne détruira pas votre santé. Mais je sais que ces titres sont davantage pour attirer l’attention. Je le fais aussi, et je ne risquerais pas de lui jeter la première pierre.

« Je suis aussi médecin »

Impossible de ne pas parler du début de la vidéo où Nassim Sahili se met en scène avec une blouse blanche et un stéthoscope pour ressembler à un médecin. Il parle des autres médecins de la fédération de cardiologie comme ses collègues avec tout le sérieux du monde.

Je connais un peu Nassim Sahili sur d’anciennes vidéos, je sais qu’il n’est pas médecin. Mais le ton employé reste sérieux, et jamais dans la suite de la vidéo il ne fera un clin d’oeil à cette blague et cette usurpation de titre.

Alors oui, je pense que la communauté du coach sportif connaît très bien la réalité et a dû saisir l’humour (c’était peut-être une private joke?), mais certains commentaires laissent à penser qu’ils croient vraiment que Nassim Sahili est médecin.

Pour moi, ça ne passe pas vraiment (et cela ne semble pas nécessaire du tout à sa crédibilité).

La suite ?

L’article est déjà suffisamment long pour vous occuper.

Faut-il faire 10 000 pas pour être en bonne santé ? D’après Nassim Sahili, il faut impérativement faire ces 10 000 pas tous les jours, et c’est non négociable.

>> Je reviens longuement dans cette seconde partie sur les bienfaits des pas sur la santé et ces fameux 10 000 pas.

Egalement, la respiration par le nez avec une attention toute particulière à la méthode Buteyko où l’art de se mettre soi-même un sparadrap sur la bouche (mouth taping) !

Les allégations médicales de Nassim Sahili sont pour le coup nombreuses et assez impressionnantes (sur l’apnée du sommeil, le ronflement, le stress, le rythme cardiaque, l’oxygénation du corps, l’asthme ou la forme du visage).

Ne manquez pas la suite !

On reste en contact ?

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