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Les recommandations sanitaires émises par des sociétés savantes et certaines institutions ne reposent pas sur les meilleures études. Pire, elles se fondent dans leur immense majorité sur le plus bas niveau de preuve scientifique.

La qualité de la preuve

Je le répète assez souvent : il faut rester méfiant et sceptique quant aux conseils sanitaires que l’on peut lire ou recevoir d’une autorité de santé, d’un professionnel ou d’un ami.

La question n’est pas de suspecter un complot derrière chaque ordonnance ou conseil avisé, mais de se renseigner sur la pertinence, l’indépendance et la qualité d’une information.

J’y ai dédié un article il y a peu, et qui visait à mieux vous armer pour analyser la qualité d’une source, mais ce billet propose de découvrir une facette plus sombre encore de ce problème.

Disons-le en des termes simples. Quand vous êtes malade ou avez un souci de santé, votre médecin va – très probablement – suivre les grandes recommandations de pratiques cliniques pour votre cas.

Cela signifie qu’il va suivre des Guidelines en anglais qui détaillent pour chaque cas, chaque problème, les traitements les plus adaptés en fonction des bénéfices et des risques.

L’objectif est de vous proposer dans tous les cas le traitement avec une balance-bénéfice / risque favorable. Autrement dit, vous aurez plus à y gagner qu’à y perdre en suivant les conseils de votre docteur !

Heureusement vous allez me dire.

Ces recommandations de pratiques cliniques existent pour pratiquement toutes les maladies, et elles sont souvent éditées par des sociétés savantes, ou des organismes publics, comme la Haute Autorité de Santé (HAS) en France.

Pourtant, la littérature scientifique qui propose une évaluation critique de la qualité de ces recommandations est claire : la vaste majorité de nos pratiques cliniques reposent sur de la mauvaise science, de faible qualité.

Autrement dit : on ne sait pas vraiment si vous aurez plus à y gagner qu’à y perdre !

Deux exemples récents pour comprendre.

Ces bien mauvaises recommandations

La cardiologie : le mauvais élève !

Les recommandations de pratiques cliniques sont toujours assorties d’une évaluation qui définit leur qualité. On parle d’un grade. Plus le grade est élevé, plus la recommandation est basée sur des preuves solides, indépendantes qui font consensus.

Les synthèses de la collaboration Cochrane en sont un excellent exemple, même si parfois ils peuvent déraper.

À l’inverse, plus le grade sera faible, plus la recommandation sera basée sur des études de mauvaise qualité. Le bénéfice du traitement n’aura rien de garanti comparé aux grades plus élevés.

Justement, une équipe de l’hôpital universitaire de Cleveland aux États-Unis a réalisé un bilan sur la qualité des recommandations cliniques dans le domaine de la cardiologie.

La mortalité cardiovasculaire est la première cause de décès dans les pays développés, c’est donc une discipline plus qu’importante.

Vous pourrez deviner les résultats ?

Seulement 9 % des recommandations en cardiologie se basent sur le plus haut niveau de preuve.

47 % des recommandations se basent sur un niveau intermédiaire de qualité des preuves scientifiques, et finalement 45 % sont fondées sur le plus bas niveau de preuves en science.

Désastreux n’est-ce pas ? Les auteurs félicitent les associations américaines de cardiologie de publier toujours plus de nouvelles recommandations de pratiques cliniques, mais s’attristent de voir qu’elles sont loin d’être “optimales”.

Voici des mots bien doux pour parler d’une situation qui peut avoir des impacts significatifs et graves sur la santé publique.

Je donne de nombreux exemples dans mon dernier livre.

Maladie non transmissible ? Pas mieux

La seconde alarme, qui nous vient d’une équipe d’universitaires brésiliens, s’est penchée sur la qualité des recommandations dans la prise en charge des maladies non transmissibles.

Là aussi, c’est un domaine médical hautement sensible puisque les maladies non transmissibles, comme l’obésité et le diabète, explosent dans les pays développés. Ces maladies sont de véritables plaies pour les médecins et les autorités de santé.

Mais sommes-nous en droit de dire que nous avons les meilleurs conseils, issus des meilleures études ? Là encore, c’est la douche froide.

D’après ces travaux, seulement 23.5 % des recommandations dans ce domaine sont considérés comme de hautes qualités. Et pour le reste ? Pour les 76.5 % restant, les recommandations sont basées sur des preuves de basse qualité.

Dit autrement, difficile de s’y fier avec certitude et confiance. Mais combien de médecins ou diabétologues le savent ?

D’après nos chercheurs brésiliens, c’est résultats sont important “dans la pratique des cliniciens et des décideurs politiques puisque la moitié de ces recommandations sont basées sur des avis d’experts plutôt que sur des essais randomisés”.

Les essais randomisés représentent la base pour comparer et mesurer la qualité d’un traitement ou d’une pratique.

L’équipe brésilienne renchérit “qu’il existe donc une marge considérable pour des recommandations biaisées puisqu’elles peuvent être influencées par les conflits d’intérêts financiers”.

Bien sûr. Ils ont raison. Ils enfoncent des portes ouvertes que personne ne veut réellement prendre au sérieux si ce n’est une poignée d’associations comme le Formindep ou récemment Anticor.

Lire ici les résultats désastreux de l’enquête du Formindep sur l’indépendance des facultés de médecine en France

Voici l’état de notre situation sanitaire, avec deux exemples qui comptent parmi les plus importants dans notre système de santé actuel.

Mais à propos de ces étranges recommandations, une petite étude toute récente s’est penchée sur une question pas si bête, à savoir : comment évoluent les recommandations cliniques entre les sociétés savantes en fonction des conflits d’intérêts des auteurs ?

Les auteurs tranchent en prenant un exemple très précis de la prise en charge des accidents vasculaires cérébraux ischémiques aigus. Deux associations leader dans le domaine, l’American College of Emergency Physicians (ACEP) et l’American Heart Association (AHA), proposent des recommandations radicalement différentes.

La première (ACEP) donne l’un des grades les moins élevés de la prise en charge de cette maladie, avec un activateur du plasminogène tissulaire, tandis que la dernière (AHA) lui confère le grade le plus élevé.

La seule différence entre ces deux associations se trouve dans les conflits d’intérêts des auteurs. Ils sont au nombre de zéros pour l’ACEP, et d’au moins 32 % pour l’AHA.

Mais l’AHA est bien habituée à nous donner des recommandations aberrantes, non basées sur de la bonne science.

  • Conclusion de tout cela : on reste vigilant, on croise l’information et on revient toujours à la source d’une recommandation.
  • Bonus : on attend qu’enfin les chercheurs se mettent à conduire des études de meilleure qualité pour éviter d’alimenter inutilement ou sciemment une cacophonie scientifique (ce fut la stratégie de l’industrie du sucre.)

5 raisons de se méfier de la science, ses résultats et son fonctionnement

La science est loin d’être parfaite. Voici des raisons sourcées pour se méfier sainement des résultats de la science et comment les améliorer.

On reste en contact ?

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2 commentaires
  1. Merci pour vos articles très intéressants et bien documentés
    Concernant les vaccins avez-vous lu les 2 livres récents du Dr Michel de Lorgeril ?
    Heureusement que des gens se bougent mais malheureusement ne sont pas lu par assez de monde…
    J’espère Que Biz pharma n’aura pas le dernier mot!!!
    Et que dire de certains journalistes pas très nets!!!!
    Bon courage

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