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La grippe qui touche le sexe masculin est incomparable de gravité avec le sexe opposé. Du moins, c’est ce que pensent les pauvres hommes malades. Le « rhume d’homme » existe-t-il vraiment ? Enquête sur un sujet amusant pour les uns, très sérieux pour les autres !

© master1305 | Freepik

Satané rhume d’homme

C’est à chaque fois le même scénario. Les rhumes et autres pharyngites commencent à circuler au travail et chez des amis. Les premiers symptômes arrivent à la maison. On éternue. Le nez coule à grands flots et les mouchoirs garnissent le sol de toute la maison.

Les gargarismes maison, comprimés de paracétamol et autres sprays pour gorge deviennent les armes d’autodéfense du quotidien (d’ailleurs, était-ce dangereux de prendre du paracétamol avec le covid-19 ?)

Mais ma compagne se remet en moins de temps qu’il ne faut pour se déboucher le nez. Moi, je suis systématiquement à l’article de la mort. J’ai ce fameux « rhume d’homme » qui me cloue au lit pendant des jours.

On en rigole beaucoup. Enfin, moi, beaucoup moins. Je me souviens l’épisode covid-19. Je suis resté une semaine dans mon lit, avec une fièvre effrayante mais indispensable, quand ma compagne s’en est remis en un jour à peine.

La vérité sur la vitamine D et les infections respiratoires

La supplémentation en vitamine D pour booster le système immunitaire et lutter contre les infections respiratoires est au centre d’une intense controverse scientifique depuis de nombreuses années.

On pourrait aussi se poser la question de l’efficacité du zinc ou du curcuma pour les infections respiratoires, en particulier sur le cas du covid-19.

La question refait invariablement surface : est-ce que les hommes exagèrent-ils leurs symptômes pour avoir un peu d’attention ?

Ou bien sommes-nous vraiment touchés par des maladies plus graves et plus longues que nos compagnes féminines ?

C’est donc à l’occasion de ce dernier « rhume d’homme » – pour lequel je commence à me remettre – que j’ai décidé de creuser la question. Scientifiquement.

J’ai un conflit d’intérêts majeur : je suis un homme. Et j’écris cet article en pleine convalescence d’un terrible rhume d’homme. J’ai donc l’envie inconsciente de trouver toutes les preuves qui valident mon expérience de vie.

Cela m’arrangerait beaucoup pour mes prochains débats.

C’est le biais de confirmation, comme j’en parlais dans notre enquête sur la consommation de sucre et l’hyperactivité des enfants.

Plus sérieusement, même si je découvre qu’on exagère un peu nos symptômes tels des dramaturges de renommée internationale, on va se pencher sur un sujet passionnant et important.

Dans les faits, vous allez découvrir que les hommes sont bien différents des femmes à de nombreux égards. Les différences sexuelles et hormonales jouent un rôle particulièrement important dans la réaction de notre système immunitaire.

Mais pas uniquement. Nous n’agissons pas aussi de la même manière. C’est l’ensemble du tableau (hormonal, génétique et environnemental) qui va nous aider à mieux comprendre ce phénomène.

Les hormones sexuelles

L’origine vient de nos chromosomes. Les fameuses paires XY et XX pour le sexe masculin et féminin. Ces chromosomes vont avoir des conséquences directes sur notre production d’hormones sexuelles.

On parle de l’oestrogène et la progestérone chez les femmes et la testostérone chez l’homme (androgène), pour simplifier. Si on associe souvent ces hormones avec l’activité et les caractères sexuels ou la reproduction, l’immunité est au centre de tous les intérêts du monde scientifique.

Booster son immunité avec les douches froides

Terminer sa douche par l’eau la plus froide possible peut-il booster le système immunitaire ? Analyse de ce coup de fouet qui rend accro.

Dans le même registre, lisez notre enquête sur la célèbre méthode Wim Hof !

Car ces hormones sexuelles ont des récepteurs dans de nombreux organes et cellules de notre système immunitaire. Nos hormones sexuelles vont donc avoir des actions directes sur notre immunité.

Et pour faire simple, les expériences montrent deux choses :

  1. Les hormones sexuelles féminines tendent à améliorer la réponse immunitaire
  2. Les hormones sexuelles masculines vont plutôt être immunosuppressives

Alors c’est extrêmement simplifié, mais c’est bien le constat des nombreuses recherches surtout en laboratoire (dans des boîtes de pétri pour lesquelles il faut être très méfiant), et chez des rongeurs.

L’oestrogène par exemple peut augmenter la production de cellules immunitaires et réduire la concentration de cytokines pro-inflammatoire.

À l’inverse, la testostérone peut réduire l’activité et la concentration de certaines cellules immunitaire, comme les NK pour naturel killer. La conséquence est glaçante : le chromosome Y peut apporter une fragilité supplémentaire pour réguler l’inflammation.

Et cela pourrait sembler logique puisque le chromosome X contient le plus grand nombre de gènes liés à l’immunité… et les femmes en possèdent deux (1) !

Deux cas médicaux illustrent justement l’impact du chromosome X sur l’immunité et l’apparition de certaines maladies. Le syndrome de Klinefelter et Turner se caractérise par un chromosome X en trop chez les hommes (ils sont XYX) et uns en moins chez les femmes (elles sont X-).

Dans le premier cas, ces hommes ont des réactions immunitaires davantage proches de celles des femmes avec plus de cellules immunitaires (cellule T CD4+ et immunoglobuline notamment) que des contrôles masculins (chromosomes XY).

Dans le second cas, ces femmes montrent des caractéristiques immunitaires proches des hommes, avec un risque accru d’être touché par des maladies auto-immunes (2).

Des analyses plus détaillées des effets du sexe, et donc de nos hormones, sur la réponse immunitaire montrent la complexité de ce grand bazar biologique (3, 4). On retrouve une forte différence en fonction de la nature de la réponse immunitaire.

Avec grossièrement :

  • Celle de type 1 qui comprend les macrophages et les lymphocytes T
  • Celle de type 2 principalement avec les lymphocytes B

Dans les deux cas, le sexe féminin améliore les deux types de réponses, mais surtout celle de type 2. L’effet immuno-suppresseur de la testostérone semble clairement établi, mais pourrait être de faible amplitude.

Cette réaction immunitaire supérieure aurait des conséquences sur les réactions aux vaccinations et leur efficacité. Les femmes ont davantage d’effets indésirables (réactions locales, fièvre) après un vaccin à cause d’un système immunitaire… dans les starting-blocks.

Après, il faut savoir raison garder. Même ces observations rendent les scientifiques perplexes. Ils ne savent pas vraiment si ces réactions plus fortes ne sont pas le reflet des différences hormonales, mais aussi génétiques ou environnementales.

Des biais dans les études sont aussi plus que probables… Car aucune étude n’est parfaite.

La science n’a pas tranché d’une manière indiscutable.

On arrive à “montrer” beaucoup de choses dans des tubes à essais, sans avoir pourtant les garanties nécessaires que cela soit utile pour nous :

La grippe qui fauche les hommes

Mais rentrons dans le vif du sujet, voulez-vous ?

Et si on partait de mon expérience désastreuse avec l’épisode de covid ? Car les résultats de la littérature sont aujourd’hui très clairs : nous n’étions pas égaux face aux conséquences du covid-19.

Les premiers rapports avaient montré très tôt que les hommes remplissaient d’avantages les salles de réanimation – et les morgues – que les femmes. En avril 2020, lors de la première vague en Italie, les hommes représentaient 58 % des infections et 70 % des décès (5).

L’âge et le sexe sont rapidement devenus les principaux facteurs de risque à prendre en compte dans la gravité du covid-19, cette infection respiratoire à cause du SARS-Cov-2.

Une vaste étude chinoise chez plus de 79 000 participants nous rappelait cette réalité scientifique et médicale (6).

« Les symptômes de covid-19 chez les hommes sont plus sérieux que chez les femmes, et conduisent plus souvent à des hospitalisations aux conséquences moins favorables. »

Des résultats confirmés par une autre synthèse et méta-analyse de chercheurs éthiopiens. Les hommes sont plus vulnérables aux conséquences du covid-19.

C’est peu ou prou ce qu’on observe pour la grippe saisonnière. Une étude hongkongaise (7), américaine (8) et chinoise (9) montre un léger surrisque d’hospitalisation et de décès pour les hommes.

L’une des hypothèses soulevées concerne la testostérone qui facilite l’internalisation du virus dans les cellules du corps (10).

Est-ce que l’histoire est donc entendue ? Sommes-nous légitimes à geindre comme des mourants dès que notre nez coule ?

Pas si vite. Des données contradictoires existent aussi… comme c’est habituel en recherche médicale.

Car ces chercheurs nous alertent aussi que les hommes n’ont pas les mêmes comportements que les femmes. Élémentaire mon cher Watson ! Ils sont notamment plus souvent des fumeurs et buveurs invétérés d’alcool (11).

Or, ces deux caractéristiques nous rendent d’avantages vulnérables aux infections respiratoires. Le sexe pourrait être l’indicateur de différence comportementale et d’hygiène de vie qui traduisent une vulnérabilité renforcée aux infections et d’autres maladies comme le cancer, les parasitoses ou les maladies auto-immunes.

Une étude chinoise montrait que les hommes âgés avaient une mortalité liée à grippe et des complications cardiaques plus faibles que les femmes (12).

En Australité, on retrouve davantage de notifications de cas de grippe chez les femmes âgées de 15 à 54 ans (13). Un résultat qui pourrait être expliqué par le fait que les hommes tardent pour aller voir un médecin.

Trop de fierté ?

Dans l’idée d’avoir un tableau d’ensemble, des chercheurs de l’école de santé publique du Maryland nous expliquent que cette susceptibilité liée au sexe va dépendre de l’âge. La période de fécondité des femmes semble être un facteur aggravant, tandis que la puberté chez l’homme représente un point charnière.

Mais comme je l’ai dit, le sexe n’est pas le seul paramètre à prendre en considération. Notre alimentation est aussi un axe majeur sur notre immunité notamment à travers ses actions sur le microbiote intestinal.

Le « rhume d’homme » existe-t-il ?

La réponse a cette question n’est pas si simple. Si nous avons des différences biologiques nettes, les travaux qui étudient les effets de la réponse immunitaire face aux hormones sexuelles ne sont pas si clairs que ça.

L’idée simpliste que la testostérone affaiblit la réponse immunitaire alors que l’oestrogène et la progestérone l’améliorent n’est pas une vérité absolue proprement démontrée. D’importantes nuances existent.

La plus récente méta-étude sur ce sujet montre que l’effet immunosuppresseur de la testostérone semble clair, mais d’un effet plutôt modéré. L’effet immunostimulant des hormones féminines n’est pas si clair ni si prononcé que ça, surtout avec des doses physiologiques (14).

Car les doses sont importantes, comme j’en parlais dans l’enquête sur l’effet toxique grave du glutamate monosodique (exhausteur de goût) avec des doses irréelles.

Sauf que d’autres travaux montrent que les androgènes, les hormones masculines, pourraient avoir des effets positifs et protecteurs contre les maladies auto-immunes et le diabète (15). Tout cela pour ne rien simplifier !

Devra-t-on nécessairement en revenir aux études épidémiologiques qui montrent, avec des divergences notables, que les hommes semblent davantage touchés par des formes graves lors d’infections virales (mais aussi de certains cancers) ?

Mais ces études souffrent de nombreux de facteurs de confusion non mesurée. Difficile d’y voir une preuve formelle. Des signaux tout au plus.

Si on prenait un peu de recul ?

D’une manière générale, les hommes sont-ils égaux avec les femmes sur l’espérance de vie et le vieillissement ? Non.

On réalise que les hommes vivent moins longtemps que les femmes. Une observation qu’on retrouve en majorité… chez tous les mammifères.

Les femelles vivent généralement entre 18 et 20 % plus longtemps que les mâles (16). Les raisons sont nombreuses, et font aussi référence au coût de la sélection sexuel.

Je ne résiste pas à l’idée de partager ici la superbe illustration de l’étude précédente sur l’espérance de vie des mammifères en fonction du sexe.

Quand les histogrammes vont à gauche, cela signifie que les femelles vivent plus longtemps que les mâles. La couleur implique un suivi transversale (gris) ou longitudinale des populations animales


C’est un peu complexe, mais la production importante d’androgène est un paramètre majeur pour la reproduction et la survie de l’espèce, aux dépens d’une immunité peut-être moins importante. C’est toujours une histoire de compromis dans l’évolution, entre les bénéfices et les risques.

Alors si la nutrition et les comportements à risques (tabagisme, alcool, etc.) sont des facteurs majeurs dans l’immunité globale, d’autres paramètres ont des rôles de chef d’orchestre avec des importances majeures.

Notamment nos fameux chromosomes sexuels, dont l’importance dans l’espérance de vie et le vieillissement fait l’objet d’imposant débat scientifique (17).

Le Graal clinique

Mais au lieu de tourner autour du pot, que peut-on répondre alors ?

Pour répondre à notre question avec rigueur et un peu plus sérieusement, il faudrait des essais cliniques où l’on compare la sévérité des symptômes d’une banale infection respiratoires entre les hommes et les femmes.

Et bien, depuis 2022, une équipe autrichienne a apporté les premières réponses à cette question (18). Ils ont réanalysé les données d’un essai clinique chez des patients atteints de rhino-sinusites aiguës.

Que retrouvent-ils ? Plusieurs choses très intéressantes.

  1. Si les médecins ne trouvent pas de différence dans la gravité des symptômes au début de la maladie entre les deux sexes, les hommes tendent à minimiser leurs symptômes.
  2. L’évaluation médicale des symptômes par des médecins montre que les femmes se remettent plus rapidement de ces infections virales.

Autrement dit : les hommes ne se plaindraient pas nécessairement plus de leurs symptômes grippaux que leurs homologues féminins, mais auraient bien une rémission plus longue que ces dernières… d’où, peut-être, cette sensation de gravité accrue.

Des résultats qui viennent joliment confirmer la clairance virale plus rapide qu’on observe chez les femelles grâce aux hormones sexuelles (le temps pour se débarrasser du virus).

Quoi qu’il en soit, le phénomène de société du « rhume d’homme » pourrait aussi nous permettre d’en jouer un peu.

Nous avons donc urgemment besoin d’étude sérieuse pour trancher. La crédibilité de nos souffrances exacerbées est en jeu.

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1 commentaire
  1. Les seuils de résistance à la douleur peuvent être variables aussi. Par exemple les simulateurs de contractions utérines qui semblent peu affecter les femmes, alors que les hommes se tordent de douleur. Cela peut jouer sur la perception du malaise physique, et éventuellement créer un effet nocebo quant à la récupération?

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