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L’ail est réputé pour ses propriétés anticancéreuses puissantes, avec une abondante littérature scientifique sur ses principaux composés. Pourtant, nous n’avons pas grand-chose à se mettre sous la dent quand il s’agit d’études chez l’homme, et non sur des rats de laboratoire.

© Anshu A | Unsplash

Ail : un couteau-suisse médicinal

Il possède une liste sans fin de bienfaits et d’intérêts thérapeutiques… l’ail est une référence dans les milieux alternatifs comme source importante de nutriments.

Avec de nombreuses propriétés thérapeutiques grâce à des composés :

  • antifongiques
  • antiseptiques
  • antiviraux
  • et même anticancers

Oui, on utilise l’ail depuis la nuit des temps à des fins culinaires. L’ail est succulent pour bien des plats, et je ne parle pas des mayonnaises qui deviennent excellentissimes avec des morceaux finement hachés !

Je ne vous parle pas des plats au four avec des gousses d’ail encore enveloppé… les saveurs sont à tomber par terre.

Mais l’ail possède aussi – et surtout – des propriétés médicinales. Aussi bien en utilisation externe pour des mycoses par exemple ou en interne pour d’autres problèmes de santé.

Mon grand-père était un fanatique d’ail. Il pouvait dévorer des gousses crues tous les jours. La légende familiale à son sujet raconte qu’il a été jusqu’à expulser un ténia directement dans le fond des toilettes ! L’ail serait aussi un vermifuge puissant dans l’esprit collectif.

Autophagie et cancer : une arme à double tranchant

L’autophagie est présentée comme un miracle biologique qui nettoie notre corps et le protège donc des dégénérescences de nos cellules. Il faudrait l’activer contre le cancer. Pourtant, ce conseil pourrait être inefficace, voire dangereux. L’autophagie pourrait être impliquée dans la progression des tumeurs avancées et le développement de métastases. Elle pourrait toutefois aider contre les petits cancers, encore précoces. Rien n’est simple dans l’univers de l’autophagie quand il s’agit de cancer.

Donc si en plus du côté appétissant, on retrouve des bienfaits sur la santé… pourquoi se priver ?

Il n’y en a pas.

Manger des noix, des fruits, des légumes et des condiments comme l’ail, sont associé à de meilleurs états de santé. Ce serait moins de cancers ou d’autres maladies cardiovasculaires.

Mais qu’en est-il d’un point de vue préventif et curatif pour l’ail en particulier ?

On rentre dans le détail.

Est-ce qu’une forte consommation d’ail, ou d’extrait d’ail (comme les poudres qu’on trouve beaucoup sur le net), peut aider à lutter contre un cancer ?

Vous saisissez la différence ? On passe d’une habitude préventive, avec un aliment qui nous apporte des composés bénéfiques et protecteurs (notamment sur les dégradations de notre ADN) à un geste curatif pour stopper une maladie.

La science des balivernes

Ils sont rares les influenceurs de la santé qui ne recommandent pas l’ail en complément pour booster son système immunitaire et terrasser les cellules cancéreuses. Que ce soit pour prévenir l’installation d’un éventuel crabe, ou le traiter s’il a déjà pris racine.

Guy Tenenbaum, l’influenceur franco-américain, n’y échappe pas. Ce youtubeur est en rémission d’un cancer métastatique de la prostate qu’il a soigné grâce à des jeûnes, et des dizaines de compléments alimentaires.

Bon, ça c’est l’histoire qu’il vous vend (oui il propose plusieurs livres à la vente sur son histoire) en omettant bien souvent qu’il a bénéficié des traitements de référence en oncologie, avec une orchidectomie, et plusieurs hormonothérapies… dont il dénigre constamment la portée ou l’intérêt.

Et Guy Tenenbaum s’abreuve quotidiennement d’ail en poudre. Dans une toute récente vidéo où il nous parle de sa “potion magique”, il constate l’intérêt thérapeutique de l’ail contre le cancer… grâce au nombre important de retours en tapant « garlic cancer » dans une base de donnée médicale.

Cancer : Les témoignages positifs sont-ils fiables ?

On retrouve pléthore de témoignages de survivants du cancer sur le Net. Des témoignages qui cumulent les incertitudes : très peu d’information médicale, aucun recul sur les patients et souvent le rejet de la médecine conventionnelle alors qu’elle a été utilisée avec succès par les survivants.

A lire ici.

Vous ne rêvez pas. Ils constatent plus de 1.000 articles en utilisant ces mots-clés, ce qui fait de facto une preuve de l’efficacité de l’ail contre le cancer.

C’est la vulgarisation scientifique à la Guy Tenenbaum, dont j’alerte les dérives depuis un moment (mais aussi celle de son acolyte Fred Evrard).

On retrouve bien entendu énormément d’étude positive en laboratoire sur des cellules cancéreuses placé dans des tubes à essai et mis en contact avec la redoutable poudre d’ail.

Mais on oublie aussi de vous dire que… l’urine est aussi redoutablement efficace pour tuer toutes les cellules cancéreuses dans cette configuration !

Même l’eau de mer ! Mais dans la vie réelle, les choses ne se passent pas comme dans un tube à essai. Le corps humain et les cancers qui le peuplent sont autrement plus complexes.

Et nous ne sommes pas des souris non plus. Les études très positives sur les souris permettent aux chercheurs d’avoir leur nom dans de joli papier et de faire avancer la recherche fondamentale, mais cela n’est à aucun moment la garantie d’une quelconque efficacité chez nous.

Cela permet d’émettre des hypothèses… à évaluer chez l’homme.

Mais revenons à nos moutons, ou plutôt, à nos preuves cliniques chez nous.

Si ces influenceurs faisaient correctement leur travail d’information, ils pourraient rapidement vous dire qu’il n’y a que deux essais cliniques qui n’ont jamais évalué l’effet d’une supplémentation en ail sur les cancers.

Seulement deux.

La démonstration par l’absurde avec Alzheimer

Et rappelez-vous, ce n’est parce que la base de donnée médicale de PubMed possède des milliers de résultats sur un sujet que cela signifie que ça fonctionne.

Je terminerais avec un exemple pour démontrer l’absurdité de ce raisonnement. Nous n’avons aucun traitement efficace contre la maladie d’Alzheimer, malheureusement. Pourtant, si j’utilise les mots-clés « maladie d’Alzheimer et traitement » dans PubMed, j’ai plus de 82 000 résultats.

Est-ce une preuve que cela fonctionne ? Vous avez la réponse.

Les preuves

Les premiers résultats nous arrivent de l’hôpital universitaire d’Hiroshima en 2006. L’étude porte sur une cinquantaine de volontaires qui ont reçu un placebo ou le précieux extrait d’ail.

Et les résultats sont… nuancés.

Les chercheurs japonais observent bien que l’extrait d’ail a permis de réduire le nombre et la taille… des adénomes du côlon-rectum. Autrement dit, ce résultat positif ne concerne que des lésions précancéreuses, mais ne nous informe pas de l’effet sur les cancers et la survie des participants.

C’est donc prometteur, d’une certaine manière, mais bien trop incertain. Car nous avons tous des adénomes dans le côlon-rectum. J’en parle dans le détail dans cet article dédié aux fibres alimentaires et au cancer colorectal.

Les secondes données sont plus intéressantes, et récentes (2019).

Plus de 3 300 Chinois ont ainsi été répartis dans plusieurs groupes, qui ont reçu des pilules comprenant des vitamines et l’ail en poudre ou bien un placebo. Les participants ont reçu pendant près de 7 ans les comprimés, pour un suivi total d’environ 20 ans.

On est donc dans une logique de prévention des cancers en prenant des suppléments, avec un suivi à long terme dans un cadre plutôt rigoureux : randomisation, aveugle et placebo.

Les résultats sont aussi très contrasté.

Pourquoi ?

Car on n’observe aucun effet sur l’incidence des cancers. Le cancer gastrique est le seul où l’on note une tendance à la baisse (mais c’est vraiment border-line comme on dit)… sans effet sur la mortalité.

On attraperait éventuellement moins de cancer, mais cela ne changerait pas notre risque d’en mourir.

Ce n’est pas vraiment extraordinaire, non ?

Des données qui devraient normalement calmer les ardeurs des influenceurs. Mais en fait c’est l’exact opposé qu’on observe ! Moins il y a de données d’efficacité, plus les promesses sont nombreuses et affirmatives !

Et les données épidémiologiques ne sont pas encourageantes non plus. Deux synthèses et méta-analyses ont fait le point sur ce sujet en 2021 et 2022, sans pouvoir montrer de bénéfices sur la prévention des cancers.

En résumé, nous n’avons aujourd’hui aucune preuve chez l’homme, via des essais cliniques ou des études épidémiologiques, que la forte consommation d’ail ou de supplément peut aider à prévenir les cancers.

Une piste prometteuse ?

Au final, la déception est le sentiment dominant quand on fait le tour des effets de l’ail sur le risque de cancer.

  • Les seules études à notre disposition s’intéressent aux propriétés préventives de l’ail, sans montrer de tendance claire sur les cancers, avec un doute raisonnable sur les cancers gastriques (5ème place des cancers en France), et une piste sur les cancers du côlon-rectum.
  • Il n’y a aucune étude clinique ou épidémiologique sur les propriétés curatives de l’ail contre le cancer. Nous n’avons rien chez l’homme.

Mais comme je le disais, nous avons pléthores de preuves indirectes d’efficacité sur des modèles animaux… nos rats de laboratoire. Mais des études précliniques prometteuses chez les rongeurs ne sont absolument pas un gage que l’on retrouve ces promesses chez l’homme.

Donc aujourd’hui il n’y a aucune raison de se passer de l’ail : c’est un délice pour les papilles et il fait partie intégrante d’une alimentation variée et équilibrée.

Mais il ne faut pas s’imaginer qu’un supplément d’ail ou d’allicine, le principe actif principal, puisse être un puissant remède contre le cancer, ou empêcher son installation. Nous n’avons pas suffisamment d’évidence pour l’affirmer avec certitude.

On reste en contact ?

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1 commentaire
  1. Ai ai ai
    Je suis le docteur en biochimie moleculaire en oncologie quebecois. Marcel Beliveau depuis des lustres… mais dans la famille allium, je préfère l’oignon rouge en salade , le blanc de poireau, poêle, l’échalote dans les huitres la ciboulette. partout…pour preserver ma prostate et les seins de ma femme. Je ne sais pas si le Docteur urologue Karim Fehri est d’accord , lui qui a écrit un livre sur la question avec kahrina Oussedick, docteur en biochimie alimentaire souvent sur Beur fm ou ,le docteur generaliste
    Willlam Berrebi qui m’estomaqué en mangeant a tous les râteliers sur Radio J ou Beur fm

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