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Son rôle majeur dans la coagulation du sang n’est probablement que la partie émergée de l’iceberg des nombreux atouts de cette vitamine. Cette vitamine pourrait avoir un intérêt marqué dans la lutte contre la calcification des artères, les maladies cardiovasculaires, mais aussi contre les crampes ou le covid long. Enquête sur une vitamine peu connue.

© mdjaff| Freepik

Elle ne fait pas souvent les gros titres de la presse, et n’embarrasse pas les laboratoires d’analyse médicale d’une surcharge de travail. Pourtant, elle pourrait être la grande oubliée pour maintenir un bon état de santé.

Je parle de la vitamine K.

Cette vitamine n’attire pas tant que ça l’attention des médecins non plus. On estime que le risque de carence est faible avec de symptômes difficiles à rater en cas de déficit avéré.

Le plus commun est l’hémorragie. Un saignement excessif pourrait être le signe d’un problème dans la formation de vos plaquettes et de la coagulation du sang.

Car vous le savez, on appuie fort sur une coupure pour comprimer le sang et attendre les miracles de la coagulation. Si on perd un peu de sang en fonction de la gravité de la coupure, l’écoulement s’arrête assez rapidement.

C’est Henrik Dam et Fritz Schønheyder de l’université de Copenhague qui ont gravé dans le marbre de la science l’existence de cette vitamine « K », pour « koagulation » en allemand, et son rôle majeur dans les saignements.

Mais son histoire ne se résume pas à une histoire de coagulation du sang. Ce serait bien trop simple, trop réducteur.

Vitamine « K-omplexité »

Derrière la vitamine K se cache en réalité une ribambelle de rejetons, qu’on peut départager en deux grandes familles

K1 et K2.

  • K1 ou phylloquinone. On la retrouve principalement les crucifères (les choux, brocolis, kale…), les huiles végétales, quelques fruits. C’est la source « végétale ».
  • K2 ou ménaquinones. Des composants qu’on trouve surtout dans les produits animaux, le beurre, les fromages et des aliments fermentés comme la nattō à partir des grains de soja.

Et pour ne rien simplifier, les ménaquinones se divisent en plusieurs sous-groupes : MK-6, MK-7, MK-8 ou encore MK-9 pour ne citer que les plus importantes.

Comme de nombreuses autres vitamines (et notamment la vitamine D et son rôle majeur dans l’organisme), une carence en vitamine K est associée à de nombreux problèmes de santé.

  • l’ostéo-arthrite
  • l’ostéoporose
  • l’insuffisance rénale
  • certains cancers
  • des pathologies dermatologiques
  • la démence
  • le vieillissement
  • ou les vastes maladies cardiovasculaires

Mais comment cette vitamine pourrait-elle être impliquée dans des maladies si diverses et importantes ? Car elle possède des actions biologiques à large spectre avec des conséquences importantes sur la santé :

  • pour la calcification des artères
  • dans la gestion de l’inflammation

Mais toutes les formes disponibles de vitamine K n’ont pas la même importance.

C’est là que toute cette affaire devient presque une investigation criminelle. Si on pensait que la K1 était la plus importante au départ, on s’est rendu qu’une forme précise de la K2, la MK-7, pourrait être en fait responsable des effets biologiques très importants.

Les premiers signaux

À Rotterdam, au début des années 2000, des scientifiques veulent explorer un potentiel effet protecteur de la vitamine K contre les maladies coronariennes. Pourquoi ces affections ? Parce que la vitamine K intervient dans le processus de calcification des artères et des vaisseaux… qui intervient directement l’athérosclérose.

C’est la formation des fameuses plaques d’athéromes qui peuvent « boucher » les artères, ou entraîner des caillots dans la circulation sanguine et déclencher des AVC. Des plaques devenues célèbres avec l’épidémie d’excès de cholestérol, et le rôle supposément néfaste du « mauvais » LDL.

Compléments alimentaires : entre bénéfices exagérés et risques passés sous silence ?

Les compléments alimentaires sont populaires dans les pays développés pour améliorer le bien-être global, prévenir des maladies et augmenter l’énergie des utilisateurs. Mais qu’en est-il à la lumière des évidences scientifiques ? 

Et dans nos sociétés développées, les maladies cardiovasculaires pèsent lourd dans la part des décès. Si on peut trouver une petite vitamine qui tempère ce risque, on tient alors le début d’un traitement prometteur.

En 2004, ils publient le risque de maladie coronarienne et de calcifications sévères des artères chez plus de 4 800 personnes sans antécédent d’infarctus.

Les sources de vitamine K sont scrutées, avec une différence entre K1 et K2.

Et patatras, les résultats sont clairs comme de l’eau de roche. Les plus gros consommateurs de K2 sont moins touchés par les maladies coronariennes, les calcifications sévères et les décès.

Aucun effet n’émerge avec la consommation de K1. L’absence de rôle stratégique dans la calcification des artères et de l’inflammation confirmerait tous les indices métaboliques accumulés.

D’autres travaux observationnels ont confirmé plus tard (ici des chez plus de 500 femmes ménopausées ou chez plus de 17 000 Danois) l’association positive entre la vitamine K2 et la calcification coronarienne, qui disparaît avec la vitamine K1.

L’affaire est-elle entendue ?

Si les signaux épidémiologiques sont séduisants et relativement faciles à obtenir, ils n’en demeurent pas moins fragiles.

Ils orientent à merveille sur les grandes tendances et les risques populationnels (notamment en pharmaco-surveillance pour repérer les événements rares) mais aussi sur les directions à prendre pour faire des essais cliniques.

Car l’histoire de la médecine nous a montré comment des effets de certaines thérapies peuvent prendre des directions totalement opposées selon l’angle d’approche : essai clinique ou étude observationnelle.

Ces dernières ne pourront jamais vraiment répondre aux attentes des cliniciens sur les apports précis de vitamine K2 dont on aurait besoin. Ou si une supplémentation serait nécessaire, et pour quelle efficacité.

Mais il y a plus gênant. D’autres travaux épidémiologiques ont produit des résultats… opposés. Les vitamines K2 n’ont plus d’effets protecteurs à l’inverse de la vitamine K1.

On ne s’étonnera donc pas qu’une équipe franco-canadienne écrive en 2021 une sorte d’avertissement au titre évocateur : « Les preuves avant l’enthousiasme… » dans la grande question des bénéfices cardiovasculaires de la vitamine K2.

Calcification : mi-figue mi-raisin

Le nerf de la guerre, c’est la calcification des artères. Et dans cette guerre, une protéine bien particulière est la cheville ouvrière des parois des vaisseaux pour repousser les phénomènes de calcification.

C’est la MGP pour matrix Gla protein.

La preuve de son rôle salvateur est venu des cobayes de laboratoire.

On peut facilement interrompre des processus biologiques chez la souris… pour voir ce qu’il se passe !

C’est en supprimant totalement l’autophagie que l’on a pu observer une multiplication affolante des cancers, et ainsi assumer un rôle profondément protecteur (un effet positif qui peut se retourner contre nous).

Ou bien le rôle stratégique du microbiote intestinal. C’est en élevant des souris stériles sans la moindre petite bactérie qu’on a pu observer l’apparition d’une myriade de problèmes de santé.

C’est donc de la manière que le monde scientifique s’est rendu compte que toutes les souris mourraient de sévères calcifications des artères en l’absence de MGP.

Avec la démonstration ainsi faite chez nos rongeurs, il ne manque plus qu’une confirmation chez l’homme !

Et forcément, il sera bien difficile de suivre pendant 30 ans des participants pour compter les morts par infarctus en fonction d’une supplémentation ou non en vitamine K2. La majorité des essais cliniques s’intéresse à la calcification des artères.

C’est plus rapide, plus simple. On fait un raccourci pour avoir des réponses.

Un premier essai clinique en double aveugle et contre placebo rapportait en 2012 des effets directs d’une supplémentation en vitamine K2 (de 360 µg par jour) sur une forme spécifique de la protéine MGP. Cette forme spécifique serait un biomarqueur de la concentration en vitamine K de l’organisme.

L’essai est court. Seulement 12 semaines. Et 60 participants. Dans cet intervalle de temps, les auteurs ne trouvent aucune modification (positives ou négatives) des autres marqueurs classiques du risque cardiovasculaires.

En 2019, des chercheurs utilisent la même dose de K2 chez des femmes atteintes de diabète de type 2. Elles se supplémentent pendant 6 mois. Au terme de l’expérience, et malgré une augmentation du biomarqueur de la vitamine K, aucune différence entre les groupes n’est observée sur le marqueur de calcification.

L’année suivante, la même équipe remet le couvert. La méthode est la même. Le dosage également, avec toujours des patients diabétiques cette fois déjà touchés par une maladie cardiovasculaire. La supplémentation en MK-7 n’a pas eu réduit la progression de la calcification des artères ni la perte de densité minérale osseuse.

Décidément. Quand ça ne veut pas, ça ne veut pas !

Mais si l’échec de la supplémentation en K2 venait d’une carence en vitamine D ? La vitamine D intervient directement dans le délicat équilibre avec la vitamine K pour prévenir – ou non – la calcification des artères.

Et la vitamine D concentre également de nombreuses promesses médicales : sur la fatigue chronique, contre les infections respiratoires (et le covid-19), les problèmes cardiaques ou encore les fractures osseuses !

Des précédents essais cliniques chez des jeunes participants avaient montré comment l’association de vitamine D avec la K2 permettait d’en améliorer sa concentration.

Et comme les seniors sont souvent carencés. Pourquoi ne pas associer les deux ? C’est bien ce qu’a fait une équipe danoise en 2022 chez 365 hommes. Ils ont reçu pendant deux ans de la vitamine D (à faible dose, 1000 UI) et MK-7 (720 µg) tous les jours.

Malheureusement, malgré la forte dose de K2 et l’ajout de vitamine D, on n’observe aucune différence sur les paramètres étudiés.

  • La progression de la calcification
  • Les opérations de la valve cardiaque
  • Les événements cardiovasculaires
  • Sur la mortalité toutes causes

Il y aurait toutefois un signal positif – mais non significatif – en faveur de la double supplémentation sur un marqueur bien précis de la santé de l’aorte.

Résultats positifs mais cliniquement non significatif… ou non significatif avec des possibles intérêts clinique ?

Voici un guide pour s’en sortir dans l’analyse des résultats statistiques.

Comment expliquer ces résultats négatifs ? La dose est peut-être insuffisante. Tout comme la durée de la supplémentation. Il faudrait peut-être penser à inclure uniquement les personnes réellement déficientes en vitamine K pour mesurer l’effet de la correction d’une carence !

Des os costauds

Et si la vitamine K pouvait vraiment renforcer les os, contrairement au mythe des produits laitiers largement entretenu par les lobbies laitiers ?

En 2023, une supplémentation en MK-7 dans un essai clinique en double aveugle contre placebo avait montré des résultats contrastés sur la densité minérale osseuse (DMO). Quelque 120 participants sous dialyses ont pris 360 µg de MK-7pendant 2 ans.

Si on observe bien une préservation de la DMO de la colonne lombaire, il y a une forte perte dans la région du radius distal. Au total, la supplémentation n’aura pas eu d’effet sur le DMO de ces patients.

La vitamine D serait-elle encore une foi l’allié incontournable avec la vitamine K pour avoir des os solides ? On dirait bien.

En 2020, une équipe chinoise fait une synthèse et méta-analyse de tous les essais cliniques sur ce sujet, en s’intéressant à la densité minérale osseuse.


La fameuse pyramide des preuves où les méta-analyses se trouvent tout en haut.

On peut fréquemment lire sur le net que les « méta-analyses sont le plus haut niveau de preuve ».

Mais est-ce bien vrai ? Je fais une critique de cette vision simpliste, et je vous propose aussi de découvrir les nombreuses limites des méta-analyses.

Les résultats plaident bien vers une augmentation de cette DMO avec la double supplémentation, et plus spécialement si on utilise la fameuse MK-7.

Crampe et covid long

Les bienfaits supposés de la vitamine K ne s’arrêtent pas aux os ou à la calcification des artères.

Un essai clinique chez 200 seniors atteints de crampes nocturnes s’est intéressé à une petite supplémentation (180 par jour) pendant 8 semaines sur la fréquence et la durée des crampes.

La fréquence et la durée des crampes nocturnes ont été divisées par 4 dans le groupe supplémenté en MK-7.

Et pourquoi pas aussi contre les effets du covid long ? C’est encore une fois l’association prometteuse entre la vitamine K2 et la D que des chercheurs montrent le potentiel thérapeutique pour lutter contre les symptômes débilitants à long terme d’une infection de covid-19.

À retenir

Des applications prometteuses aux démonstrations claires, la vitamine K2 en est encore à ses débuts. Depuis sa découverte et son rôle majeur dans la coagulation du sang, elle retient de plus en plus l’attention des chercheurs.

Son utilité pour réduire le lourd fardeau des maladies cardiovasculaires en protégeant les parois des vaisseaux d’une calcification mortifère est enthousiasmante.

Les maladies cardiovasculaires se développent à un rythme épidémique. Une banale supplémentation sans risque majeur pour la santé n’est peut-être pas à prendre à la légère.

Mais de ce côté-là, les essais cliniques viennent calmer les ardeurs positives venues des vastes études épidémiologiques.

Davantage d’études devraient être menées sur cette vitamine aux multiples facettes. Car nous l’avons vu, elle a le potentiel de limiter les crises de crampes nocturnes chez des seniors ou de réduire l’impact des infections au covid-19.

Nous n’avons peut-être pas encore élucidé complètement les posologies adéquates ni les co-associations pour en maximiser les effets.

  • Faut-il augmenter les doses et la durée de supplémentation ?
  • Faut-il systématiquement utiliser de la vitamine D en association ?
  • Combien de temps pour en mesurer des bénéfices clairs ?

Toutes ces questions demeurent centrales pour mieux cerner le rôle colossal de la vitamine K dans notre organisme.

On reste en contact ?

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1 commentaire
  1. Quelle j’ai donc au Japon d’avoir accès à du natto excellent, (150 um de MK-7 par cuillère à soupe)!
    La portion standard est généralement de 4-5 cuillères à soupe, exactement le niveau de suppélementation dans les études.
    Mais je n’en mange qu’un jour sur deux.
    C’est super bon avec un jaune cru, de l’ognon vert, la moutard et la sauce!

    Très prometteur!
    Par contre pour la D3 le soleil manque au coeur de l’hivers.

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