Les plantes d’intérieurs dépolluent efficacement nos intérieurs, c’est la NASA qui le dit. Oui, mais non. L’analyse fine des travaux scientifiques ne plaide pas pour une efficace optimale, mais plutôt pour quelque chose de négligeable.
Dépolluer l’intérieur grâce à la végétation
Nous passons le plus clair de notre temps confinés à la maison et au travail, mais également pour subvenir à nos besoins (supermarché, épicerie, etc.) et nos loisirs (cinéma, restaurant…)
Malheureusement, l’air de nos intérieurs peut rapidement se concentrer en polluants atmosphériques1 (formaldéhyde, benzène, toluène, etc.) présents dans nos murs, peintures, meubles en bois avec des conséquences parfois graves sur la santé2 (irritation de la peau, problème respiratoire, cancer, etc.)
Si on peut jouer sur cette pollution d’intérieur en utilisant des matériaux particuliers non émetteurs (peinture, murs, cuisine, entretien, enduit, etc.), ou bien avoir une ventilation performante et régulière, le recours à la végétation d’intérieur pour dépolluer notre air gagne en popularité.
Certaines variétés de plantes ornementales seraient particulièrement efficaces pour extraire des polluants de l’air ambiant. Ces plantes ne coûtent généralement pas grand-chose, nécessitent peu d’entretien et agissent passivement en permanence.
Une solution proposée par de nombreuses jardineries qui affirment clairement le rôle protecteur et purificateur de plusieurs variétés végétales, sur la foi d’un rapport prestigieux de la NASA.
De la NASA ? Oui.
Le rapport de la NASA passé au crible
La célèbre agence spatiale américaine s’est plongée dans la fin des années 80 dans une vaste étude de contrôle de la qualité de l’air en milieu confiné avec des plantes3. C’est le chercheur Bill Wolverton qui fut à la manoeuvre, et ses conclusions – positives et impressionnantes – sont à la base de toutes les études menées par la suite.
Mais qui a déjà épluché le rapport de Bill Wolverton ? Pas grand monde.
Car sur plus de 200 polluants que l’on peut retrouver dans nos maisons, l’équipe soutenue par la NASA n’en a analysé que trois : le formaldéhyde, le benzène et le trichloréthylène.
Des polluants qui peuvent causer vertiges, irritation des yeux et de la peau, mais aussi des cancers ou des anomalies génétiques selon l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS).
Dans les faits, les expériences de la NASA se sont résumées à placer dans de petites chambres en plexiglas des plantes en pot (une seule par chambre) avec une quantité connue de polluants. Au bout de 24h, on mesure la différence de concentration entre le début et la fin de l’expérience que l’on va attribuer à l’activité dépolluante de la plante.
Simple ? Trop simple peut-être. On est ici dans des conditions très contrôlées, quasi parfaites, qui s’éloignent des conditions réelles. Celles de la vraie vie.
Pourquoi ? Car dans un espace confiné (votre bureau par exemple), les polluants sont émis en permanence par les différentes sources émettrices. Et ce n’est pas seulement un polluant, mais bien un cocktail de gaz volatil.
Les résultats positifs de la NASA sont donc obtenus dans des conditions presque idéales. La température, l’humidité et la lumière sont contrôlées pour les besoins de l’expérience.
Malgré les conditions expérimentales très favorables, les résultats justement ne sont pas si extraordinaires que ça. Pour le formaldéhyde, les différentes plantes testées ont permis de réduire de 56% la concentration du polluant. C’est 45% de réduction pour le benzène et seulement 22% pour le trichloréthylène.
Les mêmes expériences ont été menées sans plante. On parle de chambre témoin dans ce cas pour mesurer l’évolution de la concentration du polluant et la comparer avec les plantes. Pour le trichloréthylène, les scientifiques ont observé une réduction “naturelle” – plutôt une mesure des fuites – de 10%, pour le benzène de 5% et pour le formaldéhyde de 3%. Ces résultats réduisent d’autant l’efficacité des plantes en pots.
Mais si on prend en compte la taille et le volume des chambres de l’expérience, les résultats prennent une tout autre dimension. Le volume des petites chambres était de 0,4 m³ et de 0,9 m³ pour les grandes. Autrement dit, les polluants aériens étaient dans un environnement extrêmement confiné et avaient – beaucoup, vraiment beaucoup – plus de chance d’entrer en contact avec la plante ou les micro-organismes qui vont les décomposer.
À titre de comparaison, un espace de travail personnel fait environ 25 m³, plus de 62 fois le volume des chambres en plexiglas pour l’étude de la NASA. Un appartement de type F3 c’est un volume d’environ 120 – 130 m³, plus de 300 fois le volume de la chambre.
Des expériences prometteuses, mais…
Les travaux soutenus par la NASA dans les années 80 ont depuis été largement repris par d’autres équipes de recherche. La qualité de l’air est au centre d’enjeu important de santé publique, d’autant plus que nous sous-estimons notre temps passé confiné. Le risque est d’autant plus grand.
Si résultats obtenus par la NASA semblent prometteurs dans des conditions très particulières et contrôle, les bénéfices s’évanouissent en condition réelle d’utilisation. Il faudrait des quantités pharaoniques de plantes en pot dans nos bureaux pour espérer purifier efficacement l’air.
Une bataille scientifique et intellectuelle se déroule en réalité sous nos yeux. Les défenseurs des capacités des plantes en pot balayent un peu rapidement les limites méthodologiques tandis que les opposants tempèrent ces cris de joie.
Des cris de joie souvent impulsés par des intérêts commerciaux. Comme vous allez le découvrir dans l’enquête complète dédiée à ce sujet, les principaux défenseurs de cette méthode naturelle en ont fait leur fonds de commerce. L’indépendance n’est ici pas garantie.
- Pour découvrir dans le détail l’efficacité réelle des plantes dépolluantes dans nos maisons et nos bureaux, lisez l’enquête dédiée. C’est un peu plus dur à avaler que la soupe qu’on vous sert gratuitement sur la toile.