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La banalité du tatouage ne cacherait-elle pas une réalité plus douteuse ? L’encre est au centre de l’attention médicale et scientifique pour son rôle cancérigène. Des études alertent sur le risque de lymphome avec les tatouages. Que faut-il en penser ?

©  Freepik

Tatouage = cancer ?

L’idée peut vous paraître étrange, mais des scientifiques et médecins se posent très sérieusement la question. Car les tatouages deviennent de plus en plus communs et accessibles, à n’importe quel âge.

Une personne sur cinq en Europe s’est déjà pigmenté la peau, de manière plus ou moins visible, et souvent à de jeunes âges.

Sauf que le tatouage repose sur la pénétration d’une encre (noire ou de différentes couleurs) à travers le derme. La douleur de l’opération ne laisse aucun doute sur le rôle du tatoueur. Il faut faire pénétrer l’encre pour rendre l’oeuvre immortelle.

Mais ces encres sont reconnues par les instances de santé comme cancérigène. On retrouve notamment des :

  1. amines aromatiques primaires
  2. hydrocarbures aromatiques polycyclique
  3. des métaux lourds (arsenic, mercure, chromium, cobalt, plomb, nickel…)
Ces composés ne sont pas des enfants de chœur quand ils pénètrent dans notre organisme. De nombreuses maladies sont associées à ces éléments, comme les cancers, les maladies neurodégénératives ou cardiovasculaires et tous les troubles du métabolisme (osseux, endocrinien, etc.)

Des ganglions sous pression

On retrouve un type particulier de cancer dans le collimateur des scientifiques, les lymphomes. Ces cancers touchent les tissus lymphoïdes (et souvent les ganglions lymphatiques) avec des formes très diverses et notamment les lymphomes non hodgkiniens.

Et les premières observations ne sont pas vraiment rassurantes.

  1. Les tatouages deviennent de plus en plus répandus
  2. L’encre contient des composés cancérogènes
  3. On sait que les composés toxiques de l’encre se déposent dans les ganglions où une réponse inflammatoire et immunitaire débute avec élargissement des ganglions
  4. On remarque une explosion des lymphomes, dont une parte reste inexpliquée

Autrement dit : tous les éléments semblent être réunis pour avoir un lien de cause à effet. Sur le papier, ce lien semble logique, plausible. Les mécanismes biologiques et les produits toxiques sont relativement bien connus.

Mais faut-il encore prouver une forte association entre les deux, et encore mieux, un lien de cause à effet.

Ce n’est pas aussi simple que ça, vous vous en doutez.

De l’aiguille au lymphome

Seules deux études nous apportent des informations sur cette question. C’est peu.

La première a été publiée en 2020 et ne retrouve pas de lien entre les tatouages et le risque de lymphome non hodgkinien et de myélome multiple (un cancer du sang qui touche des cellules du système immunitaire).

Mais cette étude ne compte pas beaucoup de participants. Un peu plus de 1 500 Canadiens de Colombie-Britannique avec une méthode d’analyse qui expose à de nombreux biais.

(c) dylan sauerwein

C’est une étude de population dite de « cas-témoin », donc méthodologiquement très limitée. Pour faire simple, les chercheurs ont utilisé les bases de données médicales canadiennes pour retrouver les cas de cancers chez nos participants.

Ils ont ensuite questionné ces personnes sur la présence de tatouage, le nombre et l’âge du premier tatouage.

On compare donc deux populations (avec ou sans tatouage) dont on ignore pratiquement toutes les caractéristiques majeures et mineures qui peuvent influencer le risque d’avoir un cancer d’une manière générale, et un lymphome en particulier.

Alors on tente de corriger, de transformer les données, d’ignorer celles qui manquent et d’ajuster les modèles autant qu’on peut pour se rapprocher d’un idéal, avec deux groupes parfaitement -identique.

Mais on obtient ce genre de groupe uniquement dans des essais cliniques contrôlés et randomisés. Et on ne réalise pas ce genre d’étude facilement pour suivre l’apparition des cancers sur plusieurs années.

Vous l’avez compris, il faut se contenter de ça. Et cette première étude est négative. Un ouf de soulagement pour les tatoués qui lisent cet article ! Mais peut-être ont-ils raté le signal ? Impossible de réellement savoir.

Ne criez pas victoire trop vite ! Une seconde étude parue cette année (2024) n’est pas aussi rassurante que la première.

Bien malin le tatoué

En s’intéressant à plus de 5 500 suédois, dont certains ont des tatouages, les scientifiques concluent que « l’exposition au tatouage est associée à un risque accru de lymphome malin. »

C’est la première fois qu’une étude parvient à ce résultat, qui pourrait faire trembler tous les instituts de tatouage et leurs clients.

Mais après la surprise vient le temps de l’analyse.

Justement, si cette étude comporte 3 à 4 fois plus de participants, elle est basée sur la même méthode : une étude de population en cas-témoin. C’est un gros point faible méthodologique pour les mêmes raisons présentées plus haut.

On compare des groupes incomparables que l’on essaye de rendre similaires par des truchements statistiques. Ainsi, on corrige par l’âge, le sexe, le niveau de revenu et d’éducation, le tabagisme et le statut marital.

C’est tout. Et c’est relativement gênant pour un type de cancer où les causes sont encore pour la plupart inconnues et largement multifactorielles. Cela signifie que ce type d’étude manque nécessairement des variables importantes qui faussent les résultats.

Mais les résultats de l’étude interrogent aussi. Car les scientifiques ont « torturé » les données dans tous les sens avec des analyses statistiques qui rapportent tout et son contraire.

Par exemple, les données globales font état d’un sur-risque statistiquement non significatif de 21 %.

Le risque de lymphome n’augmente pas avec le nombre croissant de tatouages ni avec l’utilisation d’encre colorée qui contient plus de produits cancérigènes. Ce n’est pas vraiment logique.

Car un effet dose est important à montrer dans ce contexte. Plus on s’expose, plus le risque augmente.

Les analyses temporelles sont aussi étranges. On retrouve un impact négatif du premier tatouage dans les deux premières années, mais plus rien au-delà 3 ans et jusqu’à 11 ans.

La logique plaiderait pour l’inverse, car un cancer peut prendre du temps avant de s’installer.

Cette étude ignore également le poids des participants qui peut avoir une importance majeure dans le risque de lymphome non hodgkinien.

En bref, bien qu’un lien logique existe entre le tatouage et les risques pour la santé (notamment de cancer), les preuves épidémiologiques sont discordantes, et pas franchement concluantes.

Ce type d’étude devrait être très bien contrôlé (de type cohorte observationnelle) car nous avons une population d’étude (les tatoués) qui peut avoir des comportements différents de la population générale.

Cela est surtout vrai pour les personnes arborant le plus de tatouages très visibles, mais des associations existent avec le surpoids, l’utilisation de stéroïdes, un passage en prison ou avec le nombre de partenaires sexuels.

En conclusion… impossible de conclure avec certitude. D’autres études de qualité méthodologique plus rigoureuse devraient se pencher sur le sujet et nous aider à y voir plus clair.

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